Le 19 septembre 2018, les élèves administrateurs territoriaux ont animé une consultation citoyenne sur la thématique Quelle Europe au quotidien ?. Le résultat de cet échange a été transmis au Conseil de l’Union européenne qui a remis son rapport le 3 décembre dernier. Exercice difficile que de rassembler les citoyens autour de cette thématique ! Il est temps maintenant d’en faire le bilan.

La consultation du 19 septembre a réuni 27 participants, dont deux lycéens du dispositif Egalité des chancesen lien avec l’INET, deux étudiants de Sciences Po Strasbourg et quatre habitants de Strasbourg. Les autres participants étaient des élèves de l’INET, dont les neuf animateurs du groupe Europe.

Le président de l’association Les Jeunes européens, Hervé Moritz, a introduit brièvement la séance en rappelant le dispositif.

Les participants ont choisi ensuite d’échanger en ateliers sur les thématiques suivantes:

  • Frontières, immigration et sécurité intérieure : 9 personnes
  • Culture : 7 personnes
  • Démocratie, droits de l’homme et communication sur les actions de l’UE : 7 personnes

Puis un temps de restitution d’une durée de 30 minutes a permis à chaque atelier de résumer les échanges et les propositions. Selon la méthode du débat mouvant, l’ensemble des participants ont pu se positionner sur les propositions formulées.

 

Atelier Démocratie, droits de l’homme, communication extérieure

Le débat a été axé dès le départ autour du constat d’un défaut de communication de l’UE sur ses actions. Il a été souligné que les sites institutionnels ne permettaient pas aux citoyens européens d’être informés sur les politiques communautaires.

Aussi, il est apparu nécessaire de sortir du discours technique et de parler de politique au niveau européen. Pour autant, l’idée de créer des listes transnationales semble trop complexe et porteuse d’un risque de déconnexion avec les territoires.

L’UE ne peut continuer de compter sur les relais nationaux au regard d’un risque fort d’instrumentalisation comme cela a pu être le cas en France ou au Royaume-Uni. Mais l’échelon national est probablement le bon échelon de communication.

 

Quatre propositions ont été formulées pour répondre à ce défi de la visibilité des actions communautaires. Les deux premières ont été approuvées par les participants à une forte majorité. Les deux dernières n’ont pas été soumises au vote de l’ensemble des participants et ont été élaborées en atelier.

  1. Assurer une présence régulière des sujets de politique de l’UE dans les médias et en particulier à la télévision, sur les chaînes qui génèrent le plus d’audimat :
  2. Inviter, demander, habituer les députés européens à se faire connaître de leurs électeurs et à leur rendre compte, de manière régulièreégalement, pour établir un lien de proximité qui est aujourd’hui inexistant.
  3. Réaliser des efforts d’intelligibilité pour rendre les politiques communautaires appropriables: sortir du discours technique, développer des éléments de langage, repenser les sites institutionnels et la stratégie de communication.
  4. Poursuivre l’effort de pédagogie auprès des plus jeunes: quelle histoire commune de l’Europe dans les manuels scolaires ?

 

Atelier Frontières, immigration, sécurité intérieure

 

Le débat s’est articulé autour de deux questions :

  • l’Europe peut-elle et doit-elle accueillir des migrants ? Faut-il tous les accueillir, y compris les migrants économiques ? Une intégration à l’échelle d’un village n’est-elle pas plus facile pour combattre les clichés au plus près ?

Des problèmes de fond à traiter sont ressortis à l’instar de la lutte contre les passeurs et le développement des réseaux illégaux, des dispositifs actuels de politique de quotas qui ont montré leurs limites.

  • Quelle politique de sécurité en Europe ? Le choix a été fait de dissocier sécurité intérieure et extérieure.

Sur la sécurité intérieure, les participants ont partagé les souhaits de renforcer la lutte contre la grande criminalité, de développer davantage la coopération entre les polices européennes et de permettre à l’Union Européenne d’avoir sa propre sécurité (avec quelques réserves sur ce dernier point en lien avec la souveraineté des Etats en la matière).

Sur la sécurité extérieure, tous étaient favorables à une meilleure solidarité au sein de l’UE avec des désaccords sur la mise en œuvre concrète de cette idée.

 

Huit propositions ont été formulées. Les deux premières ont été approuvées par la majorité des participants. Les six dernières n’ont pas été soumises au vote de l’ensemble des participants et ont été élaborées en atelier.

  1. Mettre en place un parrainage des nouveaux arrivants par des habitants volontaires, afin d’améliorer la qualité de l’accueil.
  2. Construire une défense européenne intégrée, afin que l’UE dépende moins de l’OTAN dans un contexte de désengagement des Etats-Unis.
  3. Instaurer un accord sur les quotas d’accueil avec une répartition par pays européen, où chacun serait tenu de respecter ses engagements
  4. Ré-affirmer l’attachement des européens au principe de la libre circulation, en veillant aux enjeux des frontières extérieures
  5. Mettre en place un accompagnement pour “sentir que j’existe”, que les migrants puissent avoir un droit à un toit et à manger (sécurité de l’aide)
  6. Déployer une force européenne à l’étranger
  7. Créer de nouvelles armes de défense à utiliser comme force de dissuasion, qui pourraient également permettre des attaques ciblées
  8. Promouvoir le dialogueet les discussions à un niveau européen et international.

 

Atelier Culture

 

Le débat a débuté sur l’Erasmus de la culture, une bonne idée pour promouvoir la mobilité et les échanges entre professionnels de la culture de différents pays.

Du point de vue des citoyens, des obstacles apparaissent dans l’accès aux productions audiovisuelles quel que soit son pays. Pour certains participants, encadrer trop strictement le droit d’auteur peut entraver l’accès à la culture et la liberté d’expression, tandis que pour d’autres, il est normal que la rémunération des créateurs soit garantie.

La politique européenne de la culture (celle de l’UE mais aussi du Conseil de l’Europe) a été décrite comme peu cohérente, sporadique. Ainsi, les capitales européennes de la culture s’apparentent plus à une publicité pour une ville en particulier, qu’à une mise en lumière des liens entre pays.

Comment promouvoir une culture européenne commune ? L’idée est séduisante, mais le risque est que les questions d’identité, polémiques, prennent le dessus dans le débat public. Le tourisme a été perçu comme un bon levier de partage, toutefois le tourisme de masse est une menace lourde sur le patrimoine culturel (exemple de Venise).

 

Quatre propositions ont été formulées pour promouvoir la culture européenne. Une proposition a été approuvée par les participants, tandis que la seconde a été écartée. Les deux autres propositions n’ont pas été soumises au vote de l’ensemble des participants et ont été élaborées en atelier.

  1. Mettre en réseau les capitales européennes de la culture, action assez simple participant d’une politique européenne de la culture plus cohérente. Selon plusieurs participants, elle permettrait de rendre visible ce qui est commun entre ces capitales, de partager les programmations, etc. Une participante a opposé que ce réseau serait artificiel et probablement mort-né.
  2. Harmoniser le statut des intermittents au niveau de l’UE, ou adopter un statut commun à tous les pays : cette proposition a été rejetée par une majorité de participants, car la France risquerait d’être perdante dans les négociations (statut très avantageux) et que d’autres harmonisations apparaissent plus prioritaires.
  3. Inventer de nouveaux modes de création adaptés à Internet, car le numérique ouvre radicalement le champ des possibles et bouleverse les approches.
  4. Adapter certaines scènes nationales en scènes européennes: ce label permettrait de produire et de diffuser une création spécifiquement européenne.

 

Et au niveau européen, quelles sont les résultats des consultations citoyennes ?

En France, 1 082 événements ont été organisés sur la quasi-totalité du territoire permettant ainsi à plus de 70 000 citoyens d’exprimer leurs points de vue.

Vous trouverez ci-joint le rapport final des consultations citoyennes (et son résumé) officiellement remis le 4 décembre 2018 à Madame la Ministre Nathalie Loiseau par la Commission Nationale du Débat Public.

L’ensemble des contributions des Etats membres ont nourri le rapport du Conseil de l’UE. Les chefs d’Etat ou de gouvernement (le Conseil européen) en ont débattu les 13 et 14 décembre 2018, et le rapport pourrait alimenter leur débat du 9 mai prochain sur les priorités du prochain cycle institutionnel.

Ces documents sont consultables et téléchargeables sur le site www.quelleestvotreurope.fr

 

Que ressort-il des consultations organisées dans 27 pays de l’UE ? Elles ont montré, selon le rapport, qu’en dépit de ses difficultés l’UE est perçue de manière positive par la plupart des participants.

Les migrations, l’environnement et l’éducation figurent parmi les thèmes les plus récurrents dans nombre de pays. Les citoyens demandent à renforcer l’action de l’UE pour protéger les frontières extérieures et lutter contre le terrorisme, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et la pollution de l’air, pour favoriser la mobilité des étudiants, etc. Pour autant, l’UE n’est pas attendue sur tout, il faut respecter les différences nationales et culturelles et concentrer l’action de l’UE là où elle peut apporter une valeur ajoutée.

Enfin, le désir a été souligné par les citoyens tout au long des consultations, d’avoir une meilleure compréhension du fonctionnement de l’UE et de ce que signifie l’appartenance à l’UE.A ce titre, le langage utilisé par l’UE pour communiquer avec les citoyens devrait être simplifié, moins bureaucratique.

 

La consultation citoyenne sur l’Europe, quels résultats ?